Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Gegrüsst seist du Maria
19 octobre 2007

Le dernier homme ?

peter_fendi

    Sur la base de la pensée moderne différentes formes d'athéisme virent le jour. On désigne par conséquent par le mot d'athéisme des phénomènes très différents, qui dans la littérature philosophique et théologique ont été rangés sous des rubriques très diverses. Au fond on peut réduire les systèmes athées à deux types  fondamentaux,  qui correspondent  à la double idée  qu'on  peut se faire de l'autonomie moderne : autonomie de la nature et des domaines des réalités profanes (culture, science, art, économie, politique, etc...) dont la connaissance et la réalisation a de moins en moins besoin de l'hypothèse Dieu (athéisme naturaliste, matérialiste, scientiste, méthodique, voire agnosticisme). D'une part autonomie du sujet, dont la dignité et la liberté s'opposent à l'idée d'un Dieu tout puissant (athéisme humaniste de la liberté et athéisme politique de la libération).
De cela il faut distinguer les formes d'athéisme qui proviennent de la protestation contre le mal et la méchanceté dans le monde. Celle-ci sont pour beaucoup d'hommes existentiellement plus décisives que les contestations théoriques et idéologiques de Dieu [...].
Il serait faux cependant de ne prendre en considération que les projets philosophiques systématiques et les grandes idéologies modernes. Ceux-ci présupposent la plausibilité préalable d'attitudes athées fondamentales. K.Rahner a forgé pour cela le mot de l'athéisme soucieux : le fait d'être subjugué par le monde devenu profane ; le sentiment de ne plus pouvoir réaliser le divin, l'expérience du silence de Dieu liée à l'effroi devant le vide et l'absurdité du monde, par conséquent l'athéisme comme interprétation plausible de la sécularisation moderne. Ces athées soucieux, qui s'effraient de l'absence de Dieu et dont le coeur est inquiet, représentent encore une chance du point de vue pastoral. A côté, il y a l'athéisme indifférent, un désintéressement total vis-à-vis des questions religieuses, un athéisme- apparement ou réellement - tout à fait tranquille et allant de soi, qui rejette  les grandes questions de la religion, ne les pose plus, voire les méprise. F. Nietzsche a décrit ce "dernier homme" avec sarcasme. Le dernier homme n'a plus pour les grandes questions qu'un clignement d'oeil : "Qu'est-ce que l'amour ? qu'est-ce que la création ? qu'est-ce que le désir ? qu'est-ce que l'étoile ? - se demande le dernier homme et cligne de l'oeil. La terre est devenue petite alors et sur elle sautille le dernier homme qui rapetisse tout. Son engeance est indestructible comme l'altise ; le dernier homme vit le plus longtemps. "Nous avons inventé le bonheur" - disent les derniers hommes et clignent de l'oeil. On travaille encore, parce que le travail distrait. Mais on prend garde pour que la distraction n'énerve pas. On ne devient plus pauvre et riche, les deux sont trop pénibles qui veut encore gouverner ? Les deux sont trop pénibles. Pas de berger et un troupeau ! Chacun veut l'égalité, chacun est égal, celui qui pense autrement va volontairement à l'asile". Par là Nietzsche a déjà anticipé sur les conséquences de l'athéisme moderne [ le nihilisme qui a imprégné la fin du XXè siècle jusqu'à aujourd'hui, plus de valeurs, plus de "pourquoi" à ce monde, la croyance qu'il n'y a pas de vérité à ce monde.] A l'encontre de toutes ces impulsions humanistes, sans Dieu, c'est à la mort de l'homme qui nous assistons.

Walter Kasper, Le Dieu des Chrétiens, cerf 1996

Publicité
Commentaires
Gegrüsst seist du Maria
Publicité
Gegrüsst seist du Maria
Publicité